BATAILLE CONTRE LES CACHALOTS
(Vingt mille lieues sous les mers)
   Jules Verne

À bord du Nautilus, pour les manœuvres, il faut un équipage assez nombreux, et les membres sont de toutes les nationalités... en plus des passagers, cela fait bien du monde sur le bateau, mais tout le monde s'entend très bien. Une autre aventure est à l'horizon : pour sauver les baleines .

Notez ce qui n'est pas réaliste dans ce récit.

- Apercevez-vous, monsieur Aronnax, à huit milles sous le vent ces points noirâtres qui sont en mouvement ?
- Oui, capitaine, répondis-je.
- Ce sont des cachalots, animaux terribles que j'ai quelquefois rencontrés par troupes de deux ou trois cents ! Quant à ceux-là, bêtes cruelles et malfaisantes, on a raison de les exterminer.
Le Canadien se retourna vivement à ces derniers mots.
- Et bien, capitaine, dis-je, il est temps encore, dans l'intérêt même des baleines...
- Inutile de s'exposer, monsieur le professeur. Le Nautilus suffira à disperser ces cachalots. Il est armé d'un éperon d'acier qui vaut bien le harpon de maître Land, j'imagine.
Le Canadien ne se gêna pas pour hausser les épaules. Attaquer des cétacés à coups d'éperon ! qui avait jamais entendu parler de cela ?
- Attendez, monsieur Aronnax, dit le capitaine Nemo, nous vous montrerons une chasse que vous ne connaissez pas encore. Pas de pitié pour ces féroces cétacés. Il ne sont que bouche et dents !

« Bouche et dents ! » On ne pouvait mieux peindre le cachalot macrocéphale, dont la taille dépasse quelquefois vingt-cinq mètres. La tête énorme de ce cétacé occupe environ le tiers de son corps. Mieux armé que la baleine dont la mâchoire supérieure est seulement garnie de fanons, il est muni de vingt-cinq grosses dents hautes de vingt centimètres, cylindriques et coniques à leur sommet, et qui pèsent deux livres chacune. C'est à la partie supérieure de cette énorme tête et dans de grandes cavités séparées par des cartilages, que se trouvent trois ou quatre cents kilogrammes de cette huile précieuse, dite « blanc de baleine ». Le cachalot est un animal disgracieux, plutôt têtard que poisson, suivant la remarque de Frédol. Il est mal construit, étant pour ainsi dire « manqué » dans toute la partie gauche de sa charpente, et n'y voyant guère que de l'œil droit.

Cependant, le monstrueux troupeau s'approchait toujours. Il avait aperçu les baleines et se préparait à les attaquer. On pouvait préjuger, d'avance, la victoire de cachalots, non seulement parce qu'ils sont mieux bâtis pour l'attaque que leurs inoffensifs adversaires, mais aussi parce qu'ils peuvent rester plus longtemps sous le flots, sans venir respirer à leur surface. Il n'était que temps d'aller au secours des baleines. Le Nautilus se mit entre deux eaux. Conseil, Ned et moi nous prîmes place devant les vitres du salon. Le capitaine Nemo se rendit près du timonnier pour manœuvrer son appareil comme un engin de destruction. Bientôt, je sentis les battements de l'hélice | se précipiter et notre vitesse s'accroître.

Le combat était déjà commencé entre les cachalots et les baleines, lorsque le Nautilus arriva. Il manœuvra de manière à couper la troupe des macrocéphales. Ceux-ci, tout d'abord, se montrèrent peu émus à la vue du nouveau monstre qui se mêlait à la bataille. Mais bientôt ils durent | se garer de ses coups. Quelle lutte ! Ned Land lui-même, bientôt enthousiasmé, finit par battre des mains. Le Nautilus n'était plus qu'un harpon formidable, brandi par la main de son capitaine. Il se lançait contre ces masses charnues et les traversait de part en part, laissant après son passage deux grouillantes moitiés d'animal. Les formidables coups de queue qui frappaient ses flancs, il ne les sentait pas. Les chocs qu'il produisait, pas davantage. Un cachalot exterminé, il courait à un autre, virait sur place pour ne pas manquer sa proie, allant de l'avant, de l'arrière, docile à son gouvernail, plongeant quand le cétacé s'enfonçait dans les couches profondes, remontant avec lui lorsqu'il revenait à la surface, le frappant de plein ou d'écharpe, le coupant ou le déchirant, et dans toutes les directions et sous toutes les allures, le perçant de son terrible éperon.


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