Le docteur Fergusson s'était
préoccupé depuis longtemps des détails de son expédition.
On comprend que le ballon, ce merveilleux
véhicule destiné à le transporter par air,
fût l'objet de sa constante | sollicitude.
Tout d'abord, et pour ne pas donner de trop grandes dimensions
à l'aérostat, il résolut
de le gonfler avec du gaz hydrogène, qui
est quatorze fois et demie plus léger que l'air. La production
de ce gaz est facile, et c'est celui qui a donné les meilleurs
résultats dans les expériences aérostatiques.
Le docteur, d'après des calculs très exacts, trouva que,
pour les objets indispensables à son voyage
et pour son appareil, il devait emporter un poids de quatre
mille livres ; il fallut donc rechercher
quelle serait la force ascensionnelle
capable d'enlever ce poids, et, par conséquent,
quelle en serait la capacité. Un poids
de quatre mille livres est représenté par un déplacement
d'air de quarante-quatre mille huit cent quarante-sept
pieds cubes, ce qui revient à dire que
quarante-quatre mille huit cent quarante-sept pieds cubes
d'air pesant quatre mille livres environ. En donnant au
ballon cette capacité de quarante-quatre
mille huit cent quarante-sept pieds cubes et en le remplissant,
au lieu d'air, de gaz hydrogène, qui, quatorze
fois et demie plus léger, ne pèse que deux cent soixante-seize
livres, il reste une rupture d'équilibre,
soit une différence de trois mille sept cent vingt-quatre
livres. C'est cette différence entre le poids du gaz contenu
dans le ballon et le poids de l'air environnant
qui constitue la force ascensionnelle de l'aérostat. Toutefois,
si l'on introduisait dans le ballon les quarante-quatre
mille huit cent quarante pieds cubes de gaz dont nous
parlons, il serait entièrement rempli ; or cela
ne doit pas être, car à mesure que le ballon
monte dans les couches moins denses de
l'air, le gaz qu'il renferme tend à se dilater
et ne tarderait pas à crever l'enveloppe.
On ne remplit donc généralement les ballons qu'aux deux
tiers. (...)
Si le docteur Fergusson
avait pu employer deux ballons, ses chances de réussir se
seraient accrues ; en effet, au cas où
l'un vient à se rompre dans l'air, on peut en jetant
du lest se soutenir au moyen de l'autre. Mais la
manœuvre de deux aérostats devient
fort difficile, lorsqu'il s'agit de leur conserver une force
d'ascension égale. Après avoir longuement réfléchi,
Fergusson, par une disposition ingénieuse,
réunit les avantages de deux ballons sans
en avoir les inconvénients ; il en construisit
deux d'inégale grandeur et les renferma l'un dans l'autre.
Son ballon extérieur, auquel il conserva les dimensions
que nous avons données plus haut, en contint un plus petit,
de même forme qui n'eut que quarante-cinq pieds de diamètre
| horizontal et soixante-huit pieds de
diamètre vertical. La capacité de ce ballon
intérieur n'était donc que de soixante-sept mille pieds
cubes ; il devait nager dans le fluide
qui l'entourait ; une soupape s'ouvrait d'un ballon à l'autre
et permettait au besoin de les faire communiquer entre eux.
Cette disposition présentait cet avantage
que, s'il fallait donner issue au gaz pour
descendre, on laisserait échapper d'abord celui du grand
ballon ; dut-on même le vider entièrement, le petit resterait
intact ; on pouvait alors se débarrasser
de l'enveloppe extérieure, comme d'un poids incommode,
et le second aérostat, demeuré seul, n'offrait pas au vent
la prise que donnent les ballons à demi
dégonflés. (...) Le filet destiné à supporter
la nacelle fut fait en corde de chanvre
d'une très grande solidité ; les deux soupapes
devinrent l'objet de soins minutieux, comme
l'eût été le gouvernail d'un navire. La
nacelle, de forme circulaire et d'un diamètre
de quinze pieds, était construite en osier,
renforcée par une légère armature
de fer et revêtue à la partie inférieure de ressorts
élastiques destinés à amortir les chocs.
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